Mon
premier ensemble complet...ce n'est pas rien dans la vie d'une collectionneuse
amatrice...(du latin amator, "celui qui aime")
Robe
d'ottoman noir perlé, velours. Manches et poignets réhaussés
d'une fine dentelle à l'aiguille. Sans griffe. Circa 1889-1890.
Ce
que les Américains nomment " Mourning gown", robe de deuil. Mais
moi j'y vois davantage le costume d'une dame distinguée et discrète,
néanmoins soucieuse de fantaisie.... ce fut un vrai coup de coeur,
le premier, et en cela le plus beau.
Autre
exemple, autre usage:
Robe
d'intérieur, "Tea Gown" en coton de couleur pêche claire,
orné de liserés plissés de dentelle mécanique
assortie. Traîne Watteau. Sans griffe. Circa 1899.
Une toilette estivale, confortable et jouant sur les transparences:
une
robe de jour, pour laquelle toute exposition est exclue, après des
années de mannequinage. Mais elle reste pourtant attrayante:
Ensemble
en soie jaune ( vert tendre par le passé) recouverte d'un fin tulle
plumetis. Ceinture se prolongeant par un grand ruban. Roses en satin sur
le corsage, faux revers de col. Griffée "Mme Margue, Lyon". Circa
1898-1899.
Encore
un costume à histoire...cette pièce marque la fin totale
de mon entêtement à n'acquérir que des pièces
à ma taille, principe qui formata le début de cette réunion
de vêtements. Sans cela, j'aurais acheté cette robe bien plus
tôt, et épargné un grande partie de sa dégradation.
Il y a des choses qui marquent, et des erreurs qu'on évitera soigneusement
de faire par la suite.
En
parlant erreurs... En voici une, justement, que je referais sûrement!
En faille
verte moirée. Applications de dentelle, larges manches gigot. Circa
1895-1896
La vie d'un collectionneur est faite de quelques déceptions, et n'est en aucun cas linéaire. Je ne regrette pas cet achat, au contraire. Mais il y a simplement de tristes découvertes qu'on n'aimerait jamais faire. Je laisse cette robe au repos, histoire de ne pas agraver son état. Lorsque j'aurai temps et compétences, j'essaierai d'en faire quelque chose de présentable. Pour l'heure, laissons-la faire la belle en photo, elle le mérite...;-)
Robe de velours vert, corsage en "coeur croisé". Griffée "Mme Delannoy, 12 rue du Helder, Paris ". Faite pour recevoir une jupe (ou tablier), qui s'agrafe. Circa 1895-1900.
Une
curieuse robe: cette pièce faisait partie d'un fond de théâtre,
et fut hélas dépouillée de ses passementeries. Ce
qui en subsiste représente encore une part du goût historique
de l'époque. Au théâtre, mais aussi au cinéma
(la première réalisation de la Société Le Film
d'Art fut l'Assassinat du Duc de Guise, oeuvre située à
la Renaissance), les aspirations artistiques s'orientaient vers l'Antiquité,
les temps médiévaux, la Renaissance, le siècle de
Watteau, l'Empire, le Directoire...avant de se consacrer pleinement à
l'orientalisme. Vers un renouveau profond et définitif de la mode.
Une jupe à traîne déjà impressionnante... En taffetas noir. Sans griffe. Circa 1900-1902.
La
même jupe, photographiée avec un corsage réassorti.
Au fond, un ensemble du même style en taffetas lourd. Très
simple, cette élégante toilette est assez particulière
: elle pouvait être reconvertie en robe de maternité, grâce
à sa taille ajustable. Il faut imaginer une future maman, tout de
noir vêtue, portant son enfant...et une traîne de plus d' un
mètre cinquante...
Sans
Griffe. Très probablement une belle fabrication "maison", calquée
sur les riches gravures des journaux d'époque. Circa 1905.
En
parlant de robe de maternité : celle-ci est beaucoup plus ancienne
que la précédente, mais a sans doute conservé son
usage bien après que la mode des crinolines fut révolue.
Elle fait partie des documents qui sortent de mon choix temporel, mais
pour rien au monde je ne l'aurais laissée au marchand. ( qui pensait
d'ailleurs tenir une robe 18ème (!!!))
Robe
de maternité d'une seule pièce en taffetas violet à
fines rayures entracites. Simplement ornée d'un petit châle
(rajout ultérieur). Boutons du corsage ajustables selon deux tailles
différentes ( double boutonnage). Circa 1855-1860.
Exemple
d'une photographie contemporaine de cette robe: la découpe
à la taille est droite.
Une
somptueuse toilette estivale: Cette robe est une de mes dernières
acquisitions, mais aussi ma préférée. J'aime sa couleur
douce, sa coupe, ses applications de lacets et le jeu de transparence que
ses deux épaisseurs de tulle plumetis créent. De plus elle
est en très bon état... C'est ce qu'on peut appeler un coup
de foudre, mais aussi un coup de poker mémorable! Ce qui doit arriver
arrive, car ce fut une vraie chance...!!!!!!
Cette tenue gracieuse montre certains des changements fondamentaux qui se produisirent peu avant 1910: l'abandon progressif des jupes à traines très encombrantes et inadaptées à la marche, le redressement du buste (la fin de ses silhouettes sculpturales, dites "en S", dont de nombreux journalistes se moquaient ouvertement...) et un goût de plus en plus marqué pour la couleur. Cependant, les codes moraux sont encore épargnés... Corset bien lacé et aide obligatoire pour l'habillage étaient toujours de rigueur absolue.
Mise
en parallèle avec un document d'époque (Journal des Demoiselles,
été 1908), et avec une autre pièce.
Et
maintenant quelques exemples qui participèrent à acheminer
la mode vers une autre ère, à l'initiative de Paul Poiret
et Jeanne Lanvin, mais beaucoup d'autres y collaborèrent, sans que
leur nom ne soit retenu par la postérité.
Robe
de style Néo-Directoire. En satin de soie écru, recouvert
de tulle brodé de roses. Col-châle. Surjupe de mousseline
de soie. Sans griffe. Circa 1912.1913.
Jupe de lainage violet, avec effet surjupe. Faux boutons et galon assortis. Ici photographiée avec un chemisier en dentelle de Luxeuil doublé tulle. Circa 1912. Ma première jupe de couleur... Après avoir redonné l'ampleur originelle de la jupe - qui avait été relevée - on obtient un exemple très proche de ce que le "demi - profane" peut qualifier de style Titanic. Cette expression toute neuve a au moins l'avantage de donner des repères temporels de nos jours...